Chaque jour, je me bats pour rester moi-même
En dépit de cette pu…. de maladie qui m’épuise chaque jour un peu plus, j’essaye de trouver la force de continuer.
Mes journées sont cadencées par la douleur ou l’apaisement. Parfois, durant quelques heures je n’y pense plus. Ces moments là sont précieux car je vis « enfin normalement », je l’oublie et me revoie comme avant : pleine d’énergie et d’envies. Ces heures je les déguste, j’en profite à fond avant que la réalité ne me rattrape.
Et quand mon époux rentre, j’ai un regret profond qui m’envahit. Le regret de ne pouvoir l’accueillir comme j’étais à 8h le matin : reposée, énergique et bien dans mes baskets. La maladie m’a rattrapé !
La fin de journée est pénible : je sens peu à peu mon moral décliner car les oublis et les douleurs me rappellent leur existence. Au fur et mesure que les heures avancent, la fatigue m’assaille. Mon corps devient lourd, instable et douloureux. Parfois mon côté gauche ne répond plus, les décharges font trembler tout mon être ! Une impression désagréable d’avoir vieillit de 40 ans en une heure. Alors je me couche : soit devant la télé au salon, soit dans mon lit devant ma petite télé. Mais les images défilent devant mes yeux sans que mon cerveau n’en capte une seule.
A mon âge, devoir vivre avec une maladie « de vieux » m’est insoutenable. J’ai encore tant de belles choses à vivre, à faire…… Oh, bien entendu pas de traitement curatif mais juste des traitements pour réduire et limiter les symptômes. Je dois malheureusement me contenter de ça !!!!!!
Mon époux refuse complètement ma maladie et m’inflige chaque jour qui passe, chaque seconde, un stress supplémentaire me rappelant inexorablement la « merde » que je suis devenue. Alors je supporte seule ma dégradation !!!
Mon corps subitement cesse de m’obéir, je deviens un pantin désarticulé, je suis prisonnière pour un temps donné de la maladie ; ma mémoire elle, me joue de sacrés tours de passe-passe me rappelant à chaque fois que je ne suis plus maître de mes pensées ni de mes souvenirs……
J’ai dû arrêter de courir sur mon tapis car ma stabilité est sérieusement remise en question et que ma dernière chute sur ce dernier m’a fait très peur ; j’ai stoppé depuis plus de 6 mois le tennis car les douleurs étaient devenues trop fortes ; en voiture je deviens un vrai danger car mes reflexes ne sont plus au top et mes repères encore moins…. en fait je dois arrêter de vivre !!!
Jusqu’à maintenant j’arrivais plus ou moins à gérer la maladie. Mais depuis janvier, date à laquelle j’ai eu la douloureuse nouvelle qu’elle me grignotait plus vite qu’il ne faudrait, je ne maîtrise plus mon stress, mon anxiété ni ma peur. Heureusement que les médicaments sont encore là pour me permettre de faire illusion quelques heures par jour !
Je n’en parle pas avec mes proches, je ne me plains pas : j’ai l’angoisse d’être considérée comme une malade à leurs yeux et pour moi cela est hors de question. J’aimerai simplement que mon mari soit à mes côtés, comprenne enfin le lourd fardeau que je porte et m’en soulage de temps à autres pour me permettre de recharger mes batteries.
Pour compenser, je me donne corps et âme pour mes enfants, ma famille, mes parents. Je m’accroche à leurs regards, leurs mots doux. Cela m’aide à tenir.
Et j’ai également la grande chance d’être bénévole pour Emmaüs. Je me pousse à continuer le rôle qu’ils m’ont attribué : je m’y sens bien car personne ne me juge. Là bas ils sont gentils avec moi, m’écoutent, me câlinent, me couvrent de jolis mots, s’occupent de moi, me font croire que je sers encore à quelque chose….. Là-bas, j’ai l’impression de vivre en tant qu’être humain « normal ». Et quand je n’ai pas la tête à ça, je me force à sortir de chez moi pour y aller car je sais pertinemment que je vais en revenir avec le moral regonflé.
Puis quand je suis seule à la maison, je fais face au mieux à mes baisses de moral, je torture mon corps quand il ne veut pas suivre mes consignes, je pleurs de mes incompétences…… SEULE – TOUJOURS SEULE. Et puis j’oublie et ma journée repart….
Paradoxe : je vais mal mais c’est moi qui remotive les troupes ! Cette force de caractère je la tiens de mon papa. Il est et restera un modèle pour moi. Grâce à lui je sais qu’il ne faut jamais se plaindre de son sort et qu’il faut toujours se battre sans jamais penser un seul instant qu’on peut perdre. La ténacité que m’a inculqué mon papa est plus forte que tous les médicaments que je prends.
Néanmoins avec toute la volonté du monde je ne guérirai plus jamais. A moins que la neurologie ne fasse un énorme bond en avant d’ici peu…..
Mon site : www.manipulation-et-demence.com